L’État-providence est moribond… Vive l’État-prévoyance !

10 octobre 2024

Nous reproduisons dans cet article la synthèse en neuf points de notre ouvrage "De l'État-prévoyance", paru aux PUF en septembre 2024.

Motif coin large

L’État-providence est moribond et délétère…

  • L’État-providence : problème de définition. Son ambivalence constitue sa première source de difficulté… sachant qu’il peut désigner un modèle politique dans lequel l’État intervient au soutien de sa population ou se rapporter de façon plus restrictive à un modèle social. De quoi parle-t-on exactement lorsqu’il s’agit de le réformer ?
  • L’État-providence est à la dérive. Dans l’État-providence « à la française », l’intervention étatique est d’une ampleur inégalée. Elle vise à assurer le bien-être de l’ensemble de la population, notamment grâce à un système de protection sociale particulièrement généreux. Conçu à une époque aujourd’hui révolue, ce modèle social a changé de nature, surtout ces quarante dernières années et ce, sans que ce glissement ait été pensé, expliqué, décidé ni, a fortiori, contrôlé. Indissociable du contexte économique, il en pallie les conséquences tout comme il les provoque : la spirale est enclenchée et depuis la crise est continue.
  • L’État-providence est devenu aujourd’hui un problème. L’État-providence est désormais trop coûteux et ce, notamment au détriment de la compétitivité de l’économie du pays et du pouvoir d’achat des citoyens. Surtout, il favorise une forme d’irresponsabilité et d’inertie collectives. De surcroît, il est inéquitable, au sens où il repose sur une solidarité financée par le travail et la dette, au détriment des jeunes générations, tout en laissant nombre de citoyens sur le bord de la route. Initialement facteur de cohésion sociale et de développement pour le pays, l’État-providence est devenu un accélérateur, sinon un facteur, de la désagrégation de la société et un frein à son épanouissement.

 

… Vive l’État-prévoyance

  • L’État-prévoyance est une proposition novatrice. Est proposé ici un nouveau modèle d’État-social visant à garantir à chaque citoyen ses droits fondamentaux ainsi qu’un solide socle de solidarité. Au-delà, chacun serait incité à travailler pour, librement, construire son avenir.

 

  • L’État-prévoyance propose de distinguer ce qui relève de la collectivité nationale (solidarité) et ce qui relève de l’initiative de ses membres (autonomie). Si cette distinction est d’abord une condition de soutenabilité financière du système, elle-même garante de l’effectivité des droits, elle est surtout une condition de l’acceptabilité du modèle, elle-même garante de la cohésion sociale. Une telle offre permet d’imaginer répondre à la diversité des situations, des besoins et des risques exprimés, la réalité sociale contemporaine étant aujourd’hui tiraillée entre un certain individualisme qui s’exprimant sans souci du collectif mine la solidarité, et une aspiration forte à l’égalité de traitement.
  • L’État-prévoyance résulterait d’une mutation de l’État-providence. Trois caractéristiques de ce dernier seraient ainsi modifiées : à l’omnipotence de l’État serait substitué un partage des rôles et la coopération entre État et agents privés ; au bien-être des citoyens garanti par l’État serait préférée une valorisation du travail comme levier d’autonomie, de création de valeur et de moteur au modèle social ; la prépondérance de la loi ferait place à une réhabilitation du contrat. Toutes les interventions économiques et sociales devraient ainsi être revues à l’aune de ces transformations, le chantier prioritaire et déterminant étant celui de la protection sociale, en ce qu’il en constituerait le cœur.

 

Comment faire émerger l’État-prévoyance ?

  • Chantier n° 1 – Refonder le système de protection sociale avec le travail comme socle de protection et boussole de redistribution. Le devoir de l’État étant de garantir les risques universels, les risques qui ne relèvent pas de la solidarité nationale doivent être pris en charge dans le cadre d’une mutualisation. Le système de protection sociale ainsi revisité comporterait deux piliers.

 

  • Chantier n° 2 – Changer le mode de production de la norme dans les relations professionnelles : de la primauté de la loi à la primauté du contrat. Le contrat devient le mode de régulation des relations sociales en se substituant à la loi qui fixe le cadre général de telles négociations, lequel est destiné à garantir le respect des droits fondamentaux.
    L’enjeu est de favoriser l’exercice d’une activité professionnelle en respectant les aspirations propres à chaque travailleur, de stimuler l’innovation, notamment en matière de protection et, plus généralement, d’encourager les acteurs économiques et sociaux à prendre des initiatives.
  • Chantier n° 3 – Faire du travail un levier de création de valeur à partager. Si l’État-providence a contribué à abîmer le travail et ce, au détriment de l’économie du pays, l’ensemble des choix économiques des dernières années doit être revu à l’aune de cet impératif : replacer le travail au centre de la création de valeur. Cela implique des réformes non seulement à l’échelon du pays (politiques économiques), mais aussi à l’échelon des entreprises (politiques managériales). L’État-prévoyance ainsi imaginé permettra de structurer les interventions économiques et sociales de l’État pour faire émerger une société active, autonome, responsable et solidaire.

 

Pour aller plus loin, lisez notre ouvrage « De l’Etat-prévoyance ».

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